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Au mois de mars dernier, tous les plans sportifs de ma 40e année tombent à l’eau, alors je rebondis vite et sors de ma poche le plan B. Un ULTRA dans le Jura, 1ère édition, pas loin de la maison. C’est tentant. C’est local. C’est Français. C’est sauvage ! 
 
Quand je me suis inscrit à cette course, j’étais (très) loin d’imaginer ce que j’allais vivre. 
Les semaines et mois de préparation défilent à grande vitesse avec des moments tout particuliers, notamment cet été avec un T.M.B et une traversée du Mercantour mémorable. N’est-ce pas Carole ? 
 
A 15 jours de l’UTMJ, les premières prévisions météo ne sont pas bonnes du tout. Et cela ne s’est jamais arrangé. Tranquillement, j’ai commencé à me préparer mentalement afin de me mettre en mode “Prépare-toi à prendre des seaux d’eau sur la tête”. Et puis l’échéance approche, et tu sens que c’est inéluctable. On va prendre cher ! 
 
Il y a des jours comme ça où on ne se doute absolument pas que les quelques heures qui vont suivre vont marquer notre vie à jamais ! 
 
Je me dirige vers la ligne de départ, aux côtés de mon assistance, assez sûr de moi. La préparation peut toujours être meilleure. Mais je ferais avec les armes du jour. Les sensations lors des derniers entraînements étaient bonnes. Espérons juste que ce soit les mêmes aujourd’hui. 
 
Sur la ligne, je suis concentré et vu les circonstances actuelles, bien conscient de ce que je suis en train de vivre. Je partage le même sentiment qu’Antoine Guillon (qui dans le même temps prend le départ des 100 Miles Sud de la Franc dans les Pyrénées). 
 

“Quel plaisir de participer à un trail. Cela n’a rien à voir avec une sortie seul dans son coin. Après plusieurs mois de cette insupportable mascarade, bien que les dirigeants s’acharnent à vouloir nous faire croire qu’il est dans notre intérêt de nous éloigner les uns des autres, de nous méfier de tous, de craindre les rassemblements, de nous terrer, de rester pendus à leurs lèvres et aux écrans, d’accepter toutes les contraintes, y compris celle de nous masquer, et bien ce simple moment de partage est revitalisant et il s’ajoute à tous ces mouvements, ces interventions de milliers de médecins, d’avocats et d’éminents scientifiques  qui dénoncent l’inacceptable, les chiffres faux, la dictature, qui tentent avec enfin davantage de résultat de réveiller la population, de sauver des milliers de vies dûs aux dégâts collatéraux, d’arrêter cette folie collective. Il faut réagir avant que les rhumes hivernaux (dont 4 formes sont des souches Covid : Hcov 229 E, Hcov OC 43, Hcov NL 63, Hcov HKU1) soient confondus volontairement (et c’est déjà le cas) avec le « 19 » pour nourrir les médias, affoler la masse et alimenter la propagande. Pensez aux enfants, au manque de respect qu’ils ont et auront de l’adulte, et ils ont bien raison. Quel avenir noir se profile pour eux à leur insu ! Le changement ne peut pas venir d’eux. Pendant ce temps, 18 000 enfants meurent de faim chaque jour ! Je ne suis pas donneur de leçon mais je n’accepte pas d’en recevoir d’infondées. Aujourd’hui, je suis fier de courir pour donner l’exemple, et je remercie tous les trailers qui se sont élancés dans ces différentes traversées. Je ferme cette parenthèse”.

 
Vendredi 02/10, départ à 8h.
Lancrans > Chézerys Forens KM 22 / 1271 D+
 

Les 250 coureurs sont rapidement dans le vif du sujet. C’est 1169 D+ qui se dressent devant nous. Autant partir prudemment. Je surveille mes pulsations. Mon rythme semble parfait. J’avale les premiers kilomètres avec beaucoup de plaisir et de lâcher prise. La pente s’accentue régulièrement jusqu’à rentrer dans un épais brouillard. On bascule sur un terrain technique car glissant à souhait. C’est difficile de voir les balises, mais je m’en sors sans encombre. En bas des pistes, à Chézerys, premier contact avec mon assistance. Chacun sait ce qu’il a à faire. Tout va finalement très vite.


Crédit photo: Benjamin Becker

Crédit photo: Benjamin Becker

 
Chéserys Forens > Bellecombe
KM 36 / 2378 D+ / vendredi 02/10 à 12h51′
 
A peine le temps de leur parler que je suis déjà reparti vers le Crêt de Chalam, une grande classique des coureurs du coin. La montée se veut régulière sans trop de technicité. Quasiment tout se court. Puis je bascule à la borne au lion avant de filer vers Bellecombe. Là, j’arrive sur un grand plateau où il faut dérouler, pas mon point fort. L’eau qui nous tombe dessus depuis quelques heures commence déjà à se faire ressentir. Pour faire court, je suis trempé ! Mon assistance m’attend ici. J’en profite pour me faire biper et foncer au coffre de ma voiture où tous les gentils parapluies s’ouvrent au-dessus de ma tête le temps que je mange un peu. J’échange un peu avec eux. Ils comprennent vite, sans trop que je m’éparpille, que ça va bien malgré le déluge. 

Crédit photo: Benjamin Becker

Crédit photo: Benjamin Becker

 
Bellecombe > Les ROUSSES
KM 68 / 3182 D+ / Vendredi 02/10 à 16h42′
 
Une section roulante, cassante, vallonnée. Les petits monts s’enchaînent assez bien pour ma part. Ma foulée reste fluide. Musculairement, tout va encore très bien.
L’enjeu sur cette section ne se situe pas vraiment sur le terrain, mais plutôt sur ce qu’il est en train de tomber du ciel. La pluie devient tellement forte qu’elle commence (déjà) violemment à atteindre les organismes. C’est clairement beaucoup trop tôt pour un ULTRA qui fait 180 km !!! 
A la première base de vie des Rousses, Sébastien Chaigneau (ici présent avec Mouss film) se rapproche de mon assistance pour leur indiquer l’exactitude des démarches à suivre si on veut, ne serait-ce qu’espérer, me voir aller au bout. 
Voilà ce qu’il faut faire : “Carole, c’est simple, quand Romain arrive, vous le déshabillez entièrement des pieds à la tête, vous le séchez, il se rhabille avec des vêtements secs et étanches, et seulement après-ça, il mange!” OK merci SEB, on va faire comme ça. 
Quand j’arrive aux Rousses, mon cerveau n’est déjà plus capable de penser par lui-même tellement les conditions météo sont rudes dehors. C’est hallucinant de ressentir ça alors que j’ai seulement couru 68 km. Je m’en remets à eux. 
Quand je pénètre dans la base de vie aux Rousses, je suis comme dans un nuage. Dans ma bulle. J’entends des voix me dire quoi faire. J’exécute comme je peux. Ça s’affaire autour de moi. Ils ont tous l’air de savoir ce qu’il faut faire. Puis, petit à petit, une douce chaleur commence à revenir sur mon corps. sans trop que je m’en rende compte, je me retrouve habillé avec des nouveaux vêtements. J’ai de l’appétit, je mange et bois chaud. Ça me fait un bien fou ! Je reviens progressivement à moi. 
Avec du recul, à l’heure où j’écris ces lignes, Carole, mes parents, Xavier et Seb ont sauvé ma course. ICI ! AUX ROUSSES ! C’est ici que tout s’est joué !

Crédit photo: Benjamin Becker

Crédit photo: Benjamin Becker

 
Les Rousses > Chapelle des Bois
KM 105 / 4638 D+ / samedi 03/10 à 01h47′
 
En sortant des Rousses, je profite des bénéfices de cette stratégie durant au moins 1h30. On dirait que la chaleur de mes vêtements ne veut plus me quitter malgré les seaux d’eau qui continuent à tomber du ciel. Je revis (un peu). Je traverse les villages et j’enchaîne les kilomètres sans trop de difficultés. J’allume ma frontale un peu avant Morbier car le jour se fait de plus en plus rare, et les sous-bois deviennent piégeux. 
C’est ici au village du fromage braisé que je vois Xavier (assistance) pour la dernière fois. C’est non sans un pincement au cœur que je l’écoute attentivement me donner ses dernières consignes de pacing. Après ceci, c’est mon ami Guillaume qui va compléter la TEAM et remplacer Xav. J’aurai toujours une pensée émue pour le dévouement de toutes ces personnes qui vibrent à mes côtés. 
Depuis Bellefontaine, je vais continuer à prendre de l’altitude jusqu’à me retrouver dans un épais brouillard. Quand j’arrive sur les crêtes, je dois résister aux rafales de vent qui prennent de la vitesse le long de la paroi rocheuse et saisir la pluie pour venir fouetter mon visage. Là haut, je vis l’enfer. Les conditions étaient terribles. L’homme, à cet instant précis, n’avait pas sa place à cet endroit. La nature était trop puissante. Peu de temps après, je commence à entendre un bruit bizarre dans ma tête. Tiens, étrange ! Qu’est-ce donc ? Je mets quelques minutes à comprendre que ce sont mes dents qui claquent fort les unes contre les autres et que le bruit résonne au plus profond de mon crâne. Il est déjà trop tard. L’hypothermie n’est plus très loin. J’ignore dans quel état je vais revoir mon assistance à la Chapelle des Bois. Je finis cette section comme je peux. Avec les moyens du bord. 
A 1 km du ravito, Guillaume m’attend sous son parapluie et m’accompagne en courant pour rejoindre le centre du village. Il me briefe. “Romain, les mecs devant toi, ils s’arrêtent au moins 40 minutes ici. Tu n’as pas le choix. Comme aux Rousses, on va entièrement te changer. L’organisation a accepté d’ouvrir des WC publics juste à côté dans la zone d’assistance pour que tu puisses t’y mettre dedans”. Je lui fais part de mes doutes. C’est la première fois depuis le départ que je doute de mes capacités à rallier l’arrivée, tellement le froid m’a esquinté. 
Même avec du recul, je suis incapable de dire exactement ce qu’il s’est passé ? Transi de froid. Je n’étais plus maître de moi-même. Je ne maîtrisais plus mes mouvements. Mon corps est en hypothermie. On me place comme prévu dans les WC publics à l’abri du froid et des courants d’air. Mon assistance s’affaire autour de moi. Je suis dans un autre monde. Physiquement là, avec mes proches. Mais cérébralement ailleurs. Tout le monde comprend rapidement l’urgence. En moins de deux, je me retrouve dans le plus simple appareil avec 4 personnes qui me frictionnent le corps avec des serviettes pour me sécher. Malgré ça, mon corps ne réagit pas. Le froid est trop profond, il est trop lent à se réchauffer. En même temps que je mange pour absorber des calories, ils m’aident à me rhabiller. Rien n’y fait. Même pas les vêtements secs. Je suis obligé de finir dans la voiture, chauffage à fond. Mon père me demande si je sens la chaleur ? Je lui réponds que : “Trop peu”. Alors que personne n’arrive à tenir dans le véhicule tellement la chaleur est insoutenable dans l’habitacle, moi, je la sens à peine. Je reste assis à la place avant du passager durant 5 minutes. Et là, une lumière me monte au cerveau : “Ne reste pas une seconde de plus ici Romain !!! Dégage d’ici !!! Sinon, tu ne repartiras jamais !!!” Ni une ni deux, j’ouvre la porte, fini d’ajuster ma tenue sous les parapluies et file retrouver les sentiers. Je suis réchauffé. Et j’ai échappé aux sirènes du sommeil, ainsi que du nid douillet que représentait il y a quelques minutes la voiture de mes parents. L’aventure continue…

Crédit photo: Benjamin Becker

Crédit photo: Benjamin Becker

 
Chapelle des Bois > Jougne
KM 144 / 5800 D+ / samedi 03/10 à 4h57′
 
Je sors de la Chapelle des Bois par les pistes de ski de fond (comment faire autrement dans le Jura ?), puis je remonte la combe des Cives. Je me sens mieux. Mes vêtements secs (pas pour longtemps !) m’aident à gagner en lucidité. Ma foulée est encore bonne. Les kilomètres défilent à bonne allure d’ULTRA. Tout va mieux ! 
Ensuite, j’emprunte les single au-dessus de ChatelBlanc avant d’arriver au tremplin de saut à ski qui accueille chaque année la coupe du monde de combiné nordique. Quand j’arrive au départ du tremplin, j’aperçois, tout petit en bas, le ravitaillement de ChauxNeuve. Ce sont 700 marches à descendre sous des trombes d’eau et un vent qui incline la pluie à l’horizontal. 
Quand je regardais les vidéos de mon assistance le lendemain de la course, j’étais choqué par la violence et le bruit de cette tempête. La preuve encore une fois qu’on ne vit pas la même chose quand nous sommes en action, ou spectateurs. Le cerveau nous permet de réaliser des choses fantastiques !
En bas, je me glisse sous la tente du ravitaillement. Au chaud. L’ambiance est au top grâce aux bénévoles tous plus sympas les uns que les autres. J’aperçois 3 coureurs en totale perdition, assis sur un banc. Les yeux rivés dans le vide. Sous une couverture. Touchés par le froid et les difficultés. Je compatis sincèrement. 
Je repars d’ici par une belle montée à travers les alpages, les prés bois et la forêt pour atteindre le Mont d’Or dans un épais brouillard. La descente sur Jougne se fait par une piste de ski excessivement raide. J’essaie d’économiser au maximum mes quadriceps en appliquant une foulée très rasante. Cette stratégie sera payante car elle me permettra de bien relancer sur le bas. 
Au vu des conditions météo, il se murmurait que l’organisation allait raccourcir le parcours et donc éviter aux coureurs de relier la Suisse par le Mont Suchet. L’idée était d’arriver à Jougne et de rentrer directement à Métabief, site d’arrivée. 
Avec tout ce qu’on s’est pris sur la tête depuis le départ, j’ai commencé  à me faire à l’idée que c’était une bonne solution et que pour la sécurité de tous, il devenait important de modifier ce parcours. 
Au-dessus de Jougne, Guillaume m’attend sous son parapluie pour effectuer le dernier kilomètre à mes côtés. Il me dit : “Romain, j’ai une bonne et une mauvaise nouvelle! La bonne, c’est que tu es 4e au classement !” Je n’en reviens même pas quand je l’entends. 4e !!?? Je me sentais en grande condition, mais de là à accrocher le top 5, quand même pas ! C’est quoi la mauvaise nouvelle ? “Romain, pas de neutralisation de course. Le parcours n’est pas modifié !”. Sur le moment, je l’ai mal pris car franchement quand ça fait déjà plusieurs kilomètres qu’on se prépare à rentrer directement, là d’un coup, le poids sur les épaules s’alourdit. Mais pas le choix. Il faut vite rebondir. On avait prévu de faire 180 km, alors on fera 180 km, même avec ces conditions météo apocalyptiques…
A la base de vie de Jougne, même combat qu’aux Rousses. Se changer intégralement et rapidement reste la priorité. Je passe quelques minutes entre les mains du podologue qui me sèche les pieds avec une solution. Imaginez un peu le résultat quand vos pieds baignent dans l’eau depuis presque 21h ! Hormis les pieds un peu flétri, je n’ai aucune égratignure ni ampoule. 
Je prends le temps de bien manger, et écoute attentivement les consignes de mon assistance. Leurs mots sont très réconfortants et encourageants. J’ai une sacré TEAM autour de moi. 
Quand je décide de m’élancer pour affronter la suite du parcours, Olivier Morin TEAM Trace de Trail (5e) arrive tout juste à la base de vie. A son regard, je comprends qu’il est dans le dur. J’apprendrais plus tard qu’il n’est pas reparti. J’aurai tellement apprécié faire un bout de chemin avec lui. Déjà pour casser la solitude mais aussi parce que c’est un coureur que j’apprécie. Je suis applaudi par les nombreux bénévoles au moment de quitter la salle, ça fait chaud au coeur !

Crédit photo: Benjamin Becker

Crédit photo: Benjamin Becker

 
Jougne > Baulmes (Suisse)
KM 160 / 6524 D+ / samedi 03/10 à 8h30′
 
Je traverse Jougne, bien décidé à en découdre avec la suite du parcours. Le début de l’ascension au Mont Suchet n’est pas très pentue. Mais quelque chose cloche. Je vois au travers du faisceau de ma frontale des trucs bizarres qui tombent du ciel. C’est de la neige. Oui, c’est de la neige. Plus je monte, et plus les flocons se font gros. Sous le refuge de la queue par la côte d’angle, la neige se met à tenir au sol. C’est tout blanc. Je sens que la température diminue encore, et encore, et encore ! A peine croyable, après le froid, les rafales de vent, voilà que la pluie incessante se transforme en neige … A ce moment-là, je n’ai plus les mots pour exprimer ce que je ressens. 
J’aperçois au loin le ravitaillement de la Grange Neuve et un homme avec une frontale qui vient à ma rencontre. C’est le chef de poste du ravito qui, plein de bienveillance, vient prendre la température du bonhomme (hahaha !!). Je lui dis que j’hallucine de voir autant de neige, et que je ne m’arrête pas sous sa tente. C’est Fort-Alamo ! Je file direct au sommet du SUCHET. Il m’indique le chemin, et me précise qu’il reste précisément +300 D+ avant d’atteindre la croix. 
Plus je monte, et plus le milieu dans lequel je me retrouve est hostile. Presque arrivé au sommet, je dois avant ça traverser tout le plateau. Le vent souffle très fort. La neige tombe de plus en plus abondamment. J’ai du mal à lire les trajectoires car les balises sont camouflées par la neige. C’est la première fois depuis que je pratique ce sport que je me dis : “Ne t’arrête surtout pas ici  ! Cours le plus vite possible.” Avec franchise, j’ai craint pour mon intégrité physique !!!
Une fois le plateau traversé, je bascule en Suisse vers Baulmes. J’assure mes appuis durant les 1000 D- tellement le terrain est technique et glissant. Chaque caillou est un piège qui peut vite faire basculer le scénario. Mes qualités de descendeur me permettent de limiter les dégâts et j’atteins Baulmes où je retrouve mon assistance au niveau du ravitaillement. 

Crédit photo: Benjamin Becker

Crédit photo: Benjamin Becker

 
Baulmes > Pré Malvilain > Métabief
KM 180 / 7800 D+ / samedi 03/10 à 12h56′
 
La montée vers les aiguilles de Baulmes est la dernière grosse difficulté de la course. Il faut passer ses 1000 D+ pour revenir en France. La montée est très sèche pour commencer. Mes bâtons me sont très utiles. Puis j’emprunte un chemin de crête avant de rallier le sommet. Les 7 à 8 cm de neige posés au sol m’empêchent de bien progresser. Je m’agace et m’impatiente parfois de devoir tenir ce faible rythme, tellement c’est impraticable. Ça glisse énormément. Peu avant le sommet, je me retrouve nez à nez avec un énorme chamois. J’en ai déjà vu beaucoup des chamois. Mais celui-là, croyez-moi, c’était vraiment une belle bête, et je n’ai pas halluciné. L’idée qu’on soit (seuls) tous les deux sur cette crête imprime un rictus (sourire) sur mon visage. Le Jura est sauvage. Ça me plait ! 
Ensuite, je plonge vers le dernier ravitaillement au-dessus du Laquerez dans la campagne jougnarde. La descente est raide au départ et la trace se veut très glissante avec la neige. Puis la terre réapparaît progressivement jusqu’à atteindre le dernier ravitaillement. Ici, il me reste 10 km pour toucher au but ! 
Physiquement, mon assistance remarque que je suis en train de lâcher. Mais n’est-ce pas un peu normal ? Après avoir bu un bon thé chaud, je m’élance dans la ferme intention de boucler la boucle du mieux que je peux. Cette dernière section n’est pas du tout technique. Mais avec 170 km dans les jambes, disons que ça change un peu la donne. Musculairement, je suis raide. Mais je cours encore sur les parties plates et descendantes. Et je marche le plus vite possible dans toutes les ascensions. La dernière montée vers le Mont Ramey est “savoureuse”. Quadricipalement insupportable ! Le vent me fait entendre le speaker à Métabief. Je me dis alors que je ne suis plus très loin. Un spectateur / accompagnateur me reconnait. Il a des mots d’une gentillesse incroyable à mon égard. Il me dit qu’il m’a suivi depuis le début et que j’ai réalisé une course sensationnelle. Il me demande la permission pour courir à mes côtés un petit moment. Chose que j’accepte volontiers. Il me laisse 100 mètres au-dessus de l’arrivée. J’essaie de profiter au maximum de cette dernière descente où j’aperçois très nettement la ligne d’arrivée. Mais j’ai mal un peu de partout alors s’est difficile à ce moment-là de savourer pleinement. J’entends que le speaker fait monter la pression à mon approche. J’ai qu’une hâte : franchir la ligne pour en finir !
 
Honnêtement, je ne réalise pas du tout ce que j’ai fait. A quelques mètres de la ligne, Guillaume est là pour une tape amicale. Ce geste signifie tellement. Ces derniers mètres, ce n’est pas pour moi, c’est pour mon assistance. Mes proches. Ceux qui m’ont suivi. C’est leur cadeau. C’est pour eux !
 
Je termine cette traversée en 28h56′ à la 4e place et 2e M1. 
 
Je me jette dans les bras de Carole et de mes parents. Je les sers fort contre moi. Je les remercie du fond du cœur. Quel dévouement ! Quelle assistance ! Quelle preuve d’amour dans de telles conditions ! 
Puis je me rapproche du speaker qui me pose quelques questions auxquelles je réponds avec plaisir. 

Crédit photo: Benjamin Becker

Crédit photo: Benjamin Becker

 
Il m’aura fallu du temps, beaucoup de temps, pour commencer à réaliser ce que j’ai fait. Je ne parle pas seulement de cette 4e place au scratch dont je suis bien évidemment ravi. Je fais surtout allusion à ces 29h d’efforts, dont 27h sous une pluie incessante, avec des rafales de vent, des tempêtes de neige, dans un froid polaire. Je parle aussi ici de ce que le cerveau est capable de faire faire à l’homme quand il est conditionné pour atteindre son objectif. Plus rien d’autre n’existe. Le dépassement de soi prend tout son sens dans une telle épreuve. C’est seulement au lendemain de la course, après une grosse nuit de sommeil, que j’ai commencé à comprendre ce qui s’était réellement passé. C’est en voyant les vidéos de mon assistance. Notamment celle quand je descends le tremplin à ChauxNeuve. Le vent est tellement fort que l’on aperçoit la pluie à l’horizontale avec un bruit assourdissant synonyme de violence extrême. La nature était hostile. Et nous l’avons défiée. Il fallait être solide et déterminé pour aller au bout de cette aventure. La moindre erreur à ce niveau, tu la payes cash ! L’ULTRA c’est exactement ça !
 
Crédit photo: Benjamin Becker

Crédit photo: Benjamin Becker

 
Merci à PACE pour la préparation !
PACE m’a apporté un cadre structuré dans ma planification d’entraînement tout en restant sur des séances ludiques et diversifiées. Incontestablement, là où PACE se démarque le plus est la méthode au ressenti (RE). Cela permet, selon la forme du jour, d’individualiser le travail.
A l’air où les sportifs veulent toujours en faire de plus en plus, la méthode PACE est davantage basée sur le qualitatif que le quantitatif. Je rejoins ce principe en expliquant que c’est en optimisant sa santé que l’on peut prétendre être “performant”, et non l’inverse. C’est pour moi la clé de la réussite. A chaque fois, je suis arrivé bien entraîné et avec un excellent état de fraîcheur sur mes objectifs. Merci.
 
Lien vers l’article de Romain Basset
 
REMERCIEMENTS :
 
– À Carole, ma bien-aimée. Waouh ! Qu’est-ce que tu nous as fait là ? Il parait que tu as piloté ça de main de maître … 😉 Tu es une magnifique personne… (ps: la gamelle au centre, la compote à gauche, mdr !)
 
– A mes parents. Merci pour votre dévouement exceptionnel. Je me souviendrai toute ma vie de ce 02/10/20 à vos côtés ! Vous m’inspirez tellement ! Merci de m’avoir transmis ces valeurs et cette éducation.
 
– A Xavier et Guillaume. Mes deux amis. Merci pour votre soutien moral et vos paroles motivantes quand ça commençait à douter sous la capuche … Sans vous, la course n’aurait pas été la même, c’est certain !
 
– A Kévin. Mon Kiné. Quel super travail on accomplit ensemble depuis déjà quelques années ! Du bon boulot. Cette course était aussi pour toi ! T’es un mec au top !
 
– A Damien. TITO pour les intimes. La Réunion n’est jamais très loin. Merci pour le partenariat avec PACE TRAIL ! Plus de doutes, tes méthodes marchent !
 
– A Gilles GALOUX. Co-fondateur de Baouw-Organic-Nutrition. Merci pour ton soutien. De croire en moi. Si tu savais le nombre de purées BAOUW que j’ai ingurgité durant cet UTMJ !!??
 
– Et bien entendu merci à tous ceux qui m’ont soutenu de près ou de loin avec vos SMS.
 
 

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